« Un après-midi de la décisive année 2016, après des journées entières confiné dans la pièce où j'écrivais le livre que vous tenez entre les mains, je suis sorti marcher sans véritable but. La ville de l'Est où je suis né et vis encore est assez petite et bien agencée pour ne jamais vraiment s'y perdre, et si vous n'avez pas d'endroit précis où aller, il est fréquent que vous repassiez alors sur vos pas. Comme il pleuvait à verse ce jour-là, j'avais au moins une bonne raison d'avancer sur les trottoirs le corps incliné vers l'avant, le menton engoncé dans le col de ma parka, les yeux baissés, mais dès que la pluie eut cessé et que je relevai la tête pour la baigner dans la lumière de ce nouveau mars, faisant front aux passants qui venaient dans ma direction, j'ai vu qu'ils me dévisageaient - et j'ai vu la frayeur dans leurs yeux. » Thierry Hesse Le roman impossible